extrait de carnet de route

Publié le par Serge Xavier OGA

Sur les traces de Florence

Le 02 aout 2009, j’avais décidé de reprendre mes forces au Monastère Cistercien de Parakou.

Pourquoi aller si loin, pourquoi parcourir 1000 km pour reprendre ses forces.

Ces questions banales, je ne me les pose jamais. Je suis un aventurier, un voyageur et les distances sont comme des amis de route. Je les côtoie, je les aime. Mais ce n’est pas cela qui explique ce voyage.

 

Assez de diversions, oui assez de diversions. Je vais au monastère pour respirer de l’air pur, entendre les oiseaux chanter, apprendre les rudiments de la vie : silence on travaille et on prie.

Oui silence rime avec prière et travail. Se lever à 4 heures même si on ne participe pas à l’office et entendre des psaumes de supplication adressés au Seigneur depuis la grande chapelle, c’est reposant pour le corps n’est ce pas. C’est bien c’est doux et que sais- je encore.

C’est déjà mille raisons de s’y rendre. Là-bas, on peut revisiter en silence sa vie, balayer les mauvaises idées qui trônent dans la tête, bref se refaire une jeunesse dans la tête.

 

Assez de blabla, assez de blabla, maintenant le film de la route.

 

Il était 4 heures ce dimanche matin lorsque je pris la route de Rimbo, le car de transport en commun qui devrait me ramener à Dosso. J’étais fatigué ce matin là puisque la nuit a été courte. Tout le mois de juillet, je l’ai passé sur les routes. Le samedi, j’étais au bureau jusqu’à minuit. Il fallait liquider les dernières instances.

 

J’arrive alors à Dosso après 9 heures de car. Ce n’est que la moitié de la route. Ensuite direction Gaya puis Malanville, ville aux mille moustiques. La nuit a été courte très courte et pénible. Le matelas que mes hôtes m’avaient offert avait peut être 15 ans d’âge. Courbatures,

insomnies mais je n’avais pas le droit de leur dire que c’était méchant. Ils m’ont offert leur maison, leur nourriture et surtout leur protection.

 

Je pris congés d’eux vers 6h30 du matin. Le maître de maison me déposa à la gare.

Le car qui nous ramène sur Parakou, c’était un au revoir la France, c’est une vielle bête qui avait encore de l’énergie. Il a rougi à 7h20 mais son ardeur a été freinée par une grande pluie.

Il fallait rouler prudemment, ce que le driver a fait avec brio. Bizarre et bizarre, l’eau avait réussi a trouvé une place dans le car. Mon sac dans lequel je conservais mes cours de théologie était mouillé mais rien de grave. Ainsi va la vie dans les cars béninois. De l’eau qui coulait par les toits d’un car, as-tu déjà vu cela ? Dommage, il fallait être abord de mon car ce jour là.

 

Arrivé à Parakou, j’ai eu la malchance d’appeler Sr Isabelle pensant profiter de son occasion pour rallier le monastère. Sr Isabelle s’occupe de la livraison et des courses du Monastère.

Elle était régulière à Parakou. Il a fallu 2 heures de temps pour que la cellérière vienne me chercher. C’était un peu agaçant mais bon, ce temps m’a permis de me faire des amies. Deux jeunes espagnoles qui demandaient un tel pour appeler une religieuse à qui elles venaient rendre visite. Oh les béninois ! Personne n’était disposée à leur passer leur téléphone. Pourtant à Paris, il n’est pas rare d’avoir recours au téléphone du clochard pour passer un coup de fil même s’il vous le facture un peu cher. Mais bon, le Bénin, tout le monde n’est pas gentil.

Mais moi, je l’ai été. J’ai offert mon téléphone aux 2 jeunes dames à qui j’ai adressé quelques mots en espagnoles.

Elles prirent le téléphone et passèrent leur coup de fil et aussitôt la religieuse vint et les deux dames s’engouffrèrent dans la voiture sans me dire au revoir. C’est leur culture, pas la mienne. Je n’ai pas offert non plus mon tel pour recevoir un merci en retour.

Enfin le monastère, les longs arbres, la petite cheminée et les maisons sous mes yeux. Un peu fatigué, mais très content d’avoir atteint la destination sans difficulté majeure. Deux jours de voyages non stop, c’est déjà suffisant pour bien se reposer.

 

Elle m’accueille, quel plaisir de la revoir et de savoir qu’elle s’occupe toujours bien de ses chiens. La sœur Cyrille, elle porte le nom de mon père. Disons, c’est papa qui m’accueille. Je ne peux rêver mieux.

Ainsi commence une nouvelle vie, une vie de 10 jours qui plonge dans les réalités de notre vie de citadin. On apprend à respecter l’autre mais souvent le naturel revient au galop. Oui c’était un midi, mon naturel revient au galop. Je jouais de la musique des Keur moussa que j’aime beaucoup, j’avais oublié de bloquer mon haut parleur et l’hôtelière passant par là me ramena à l’ordre avec un sourire débordant. « Couper votre musique pour ne pas gêner les pères en retraite et qui logent à coté de vous » avait-elle dit.

 

Mais justement c’est eux qui m’ont entrainé. Eux aussi jouaient de la musique de temps en temps et comme qui s’assemble se ressemble, j’ai fini par succomber.

 

Je ne suis pas encore au bout de mes surprises. C’était l’un des plus beaux voyages. Vous le saurez plus tard.

 

J’avais la nostalgie du Niger, de mon fils, de ma femme et de mon chien Kawalè.

Un soir, alors que je revenais de la ville, j’aperçu au loin, trois silhouettes. C’était des connaissances du Niger. Ils étaient au fait 5. Ils ont décidé de venir passer quelques jours au monastère de Parakou : Odile, Bruno, Ellé, Daniel, Louise. Un little Niger renait. Nous avons passé de très beaux séjours. Puis, Bruno s’en alla à Cotonou, moi aussi, je repris la route du Niger. Il ne restait que quatre. Ainsi va la vie. Il fallait que quelqu’un quitte le premier.

 

Surprise pour surprise, j’en ai eu. Arrivé à Parakou, je partis pour Tchachou où s’séjourne mon papa en convalescence chez Gaspard, un des ses fils. A destination, l’on m’apprenait que Florence, parti de longue date au USA et que je n’avais jamais vu, était au bénin avec son mari. Comment faire pour la voir. Heureusement que le téléphone cellulaire existait. J’ai pu lui parler et espoir de se voir était né. Trois jours plus tard, elle m’offrait un large sourire. Alors que j’étais encore dans la petite chapelle du monastère méditant sur notre vie, la sœur Noélie vint et me dit : écoute ta prière. Il y a des visiteurs pour toi. En sortant de la chapelle, j’aperçus 2 femmes et un géant qui était resté à mes côtés dans l’église mais je n’avais jamais imaginé que ce géant blanc était un beau à moi.

 

L’accolade fut chaleureuse et douce. En bon garçon, je me suis abstenu de verser quelques larmes. Mais mon cœur pleurait de joie. Enfin, comme le vieux Siméon, j’ai enfin vu celle qui me parlait régulièrement au téléphone. Elle était belle, un peu fatiguée par le long voyage mais son visage quoique fatigué laissait apparaître une beauté impeccable. Je compris alors pourquoi ce géant devant moi et qui avec sa voix baroque prononçait quelques mots Idaatcha avait décide de l’épouser. J’imagine leur première rencontre. Peut être qu’il n’avait pas pu dormir. La beauté ne meurt jamais.

 

Florence, Adelaïde et son mai s’en allèrent. C’était trop court mais trop belle, cette rencontre. Je n’avais pas imaginé qu’on allait se rencontrer.

Les bons voyages vous réservent toujours quelques souvenirs. Toute la famille était presque au complet.

 

C’était un jeudi que j’allais leur rendre visite à Parakou. Je retrouve son mari avec une épaule déboitée. Le Mr. avait décidé de faire de la moto mais avait oublié que les rues de Parakou n’étaient pas celle de Boston. Il a été victime d’un léger accident. C’est aussi une très belle vacance à l’eau chaude qui a démarré pour lui. Sa belle sœur, avec de l’eau chaude lui massait régulièrement l’épaule. Heureusement que tout s’était bien passé. Quelques égratignures en dehors de l’épaule. Ce n’était pas méchant…. Je causais avec lui et il me parlait un peu de leur vie, de leur pays et aussi de plein d’autres choses. Enfin, c’était entre nous. Ce qui était dommage, je n’avais pas eu une occasion pour causer en tête à tête avec Florence. J’avais beaucoup de choses à lui dire et sans doute elle aussi. On avait eu que quelques bribes de mots. Sa voix était si belle qu’elle trahissait un peu son âge. C’était une voix de jeune fille. Son mari, c’était un grand baryton. C’était comme moi pour ceux qui me connaisse.

 

 

Au cours de ce voyage, je voulais voir Lydie aussi mais le temps ne lui a pas permis de venir à ma rencontre comme envisager.

 

 

Et que Dire de papa. Il a beaucoup vieillit mais c’était normal. Peut-on être jeune à presque 100 temps ?

Il était encore lucide. Ses souvenirs d’enfance étaient toujours là mais ce qu’il fait ne m’a pas trop plu. Il ne veut pas enlever ses vieux habits alors qu’il dispose d’une dizaine de tenue que ses enfants lui ont offerte. Dans la chambre qu’on lui avait donnée pour ce séjour forcé, il y a un peu de rose. C’était la couleur de la pommade qu’il utilisait pour traiter la plaie qu’il a à la plante des pieds. Il dormait sur un petit lit de militaire. J’avais proposé qu’on lui confectionne un lit plus confortable mais il refusa. Il rêve toujours rejoindre son village mais j’ai peu que ce ne soit pas de sitôt. Lui rêve du contraire. C’est normal. Il est en exil. Durant mon séjour, je lui ai rendu visite deux fois et nous avons longuement échangé. Je n’aime pas trop le voir souffrir et passer son temps dans cette chambre, c’est pourquoi, je n’ai pas pu passe quelques jours là.

Il a toujours son téléphone portable dans la poche. C’est dangereux mais que redoute-on à cet âge.


 

 

J’achevai mon séjour au Bénin par une bonne nouvelle aussi. Ma nièce Marthe devint maman pour la 2ème fois. Elle est un peu pressée du mois son mari. Au Bénin, quand l’enfant commence à marcher, il lui faut un petit ou une petite sœur sinon tu as tout le monde contre toi. Le beau garçon vint au monde au moment où Xavier, Florence et son Mari quittèrent le Bénin.

 

 

Mon retour allait être mouvementé. Je quitte à Parakou pour Malanville à 14h30. Le car connu une avarie à Kandi. Un des pneus avait éclaté et le secours était aussi défectueux. L’escale forcée a duré deux heures. Arrivé à Malanville courant 20h30, je traversai la frontière. A chaque poste de police, il fallait payer 500 francs avant de recevoir le cachet sur votre passeport. C’était un business rodé. Personne n’échappe à cette dime frontalière. A Gaya, je prends la direction de Dosso dans un véhicule de port. On arriva à Dosso vers 00h30mn. A la gare de Rimbo, il n’y avait plus de place pour Maradi le jour suivant. Que faire ? Je décidai de prendre les au revoir la Belgique. Ce sont des véhicules deuxièmes mains provenant de l’Europe via le port de Cotonou. Les chauffards qui les conduisaient roulent souvent sous l’effet des amphétamines toute la nuit. C’est rapide mais la mort est aussi au bout de la ligne pour les malchanceux. Après 2 heures d’auto stop, un driver m’embarque pour Maradi. C’était un nigérian. Il partait sur Kano dans une petite starlet. Pour 600 km, j’ai déboursé 12.000 CFA. C’est deux fois le prix de la course dans les cars. C’était aussi le prix de la nuit.

 

La petite voiture roulait trop vite. J’ai récité toutes les bonnes prières afin que le chauffeur ne s’endorme pas au volant. Il fumait, croquait des colas et des chewgum. Bref tout ce qu’il fallait pour ne pas somnoler. Je causais de temps à autre avec lui en anglais pour le maintenir en éveil. Je voyais ces paupières battre. Il baillait souvent aussi. C’était insupportable de voyage dans un véhicule qui avale du 120km/h alors que son chauffeur avait sommeil.

 

On roula toute la nuit. Vers 10h30 le jour suivant, j’arrive à destination. Fatiguée par la peur de vivre les derniers jours de ma vie de cette voiture bleue.

 

Ainsi prend fin cette aventure. Je sais que c’est un peu du polard mais c’est le vrai film, celui d’une rencontre à la Florence.

 

 

 

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